La thérapie familiale s’enracine dans l’approche systémique des relations humaines.
S’il fallait nommer ce qui rend cette approche si particulière, je dirais que c’est l’idée de la circularité versus linéarité.
En effet, notre façon habituelle de percevoir nos interactions avec les autres est la plupart du temps linéaire. Nous recherchons le lien causal, nous répartissons les rôles entre les uns et les autres (victime, bourreau, ami, ennemi, allié, concurrent etc.), enfin nous faisons des liens en nous basant sur nos expériences et nos connaissances. Tout cela suit un mouvement unidimensionnel et unidirectionnel. Ainsi la complexité des relations humaines peut être saisie plus facilement par notre cerveau qui privilégie les chemins bien connus et simples.
La circularité suppose de notre par un effort conscient pour sortir des « vérités uniques ». Penser que nous sommes pour quelque chose dans le comportement de l’autre, dans sa souffrance ou dans son symptôme constitue les prémisses de cette approche circulaire. L’enfant fait des caprices et nous réagissons par cris, et plus nous réagissons par cris plus il fait des caprices. Si nous pensons que nous crions parce qu’il fait des caprices ou qu’il fait des caprices parce que nous crions, nous sommes dans la logique linéaire, dans le domaine des vérités uniques, où il y a une cause et un effet. L’approche systémique consiste à prendre une position méta, qui permet d’englober l’ensemble de ce cercle vicieux cris-caprices-cris-caprices et d’envisager d’autres hypothèses (vérités multiples) pour comprendre pourquoi ce schéma est devenu utile, comment le système familial en profite et comment ce système peut intégrer d’autres choix, plus écologiques et plus heureux en termes de bien-être général.
Ainsi, pour répondre à la question, je dirais que la thérapie systémique familiale et du couple s’adressent en premier lieu à ceux pour qui leur vérité unique est devenue une corvée et qui sont prêts à s’ouvrir à d’autres vérités, qui voient l’impasse de la logique relationnelle habituelle mais n’arrivent pas à s’en sortir.
Faire de la thérapie suppose un courage extraordinaire. D’abord, parce que la thérapie nous change et le changement nous oblige de sortir de notre zone de confort. Et le changement prend du temps. Pour que notre cerveau puisse former de nouveaux réseaux neuronaux, il faut un certain nombre de répétition. Cela concerne tout nouvel apprentissage mais aussi toute ouverture d’esprit. Notre cerveau d’enfant a mis du temps pour apprendre le vélo mais aussi pour intégrer le fait que la Terre est ronde ou pour apprendre à se mettre à la place de l’autre. Nous avons également besoin de temps pour intégrer les nouvelles attitudes et pour changer la qualité de nos relations.